«

»

Oct 18

Montreuil : Oui à un nouveau collège, non à la ghettoïsation scolaire !

Les questions au sujet de l’avenir du collège Lenain de Tillemont sont récurrentes de la part des familles du quartier Bel-Air-Grands-Pêchers (Haut Montreuil). Cependant, voilà bien longtemps que le désintérêt des pouvoirs publics concernant cet établissement est manifeste. La création d’un nouveau collège à proximité du quartier relance aujourd’hui le débat.

Lenain de Tillemont, un collège en grande difficulté

Des locaux anciens et vétustes, une sectorisation qui pousse à la ghettoïsation, Lenain de Tillemont est non seulement victime de sa réputation mais aussi des dégâts entrainés par les réformes locales et nationales (carte scolaire…). Les mesures issues de la politique d’éducation prioritaire, comme par exemple le dispositif Eclair, n’y changent rien. L’établissement repousse et n’attire plus (chute des effectifs…). Malheureusement, la bonne volonté des familles et le travail quotidien de l’ensemble du personnel de l’établissement ne suffisent pas à palier cela.

Lorsque la création d’un nouveau collège aux portes du quartier a été annoncée, les parents d’élèves ont cru que ce qu’ils avaient tant espérés se réalisait enfin. Leurs enfants allaient pouvoir intégrer un établissement moderne, flambant neuf, entièrement équipé et assurant très certainement une plus grande mixité sociale. Tant de facteurs permettant de pouvoir repartir sur des bases plus sereines et d’ainsi favoriser la réussite des élèves.

Aujourd’hui cependant, parents et enseignants déchantent. Un neuvième collège va bien voir le jour dans le Haut Montreuil, mais pour Lenain de Tillemont et la majeure partie de ses élèves, rien ne va changer.

Un nouveau ghetto scolaire dans le Haut Montreuil ?

Le périmètre de recrutement du collège des Murs-à-Pêches, actuellement en construction au bout de l’impasse des jardins Dufour, ne concernera pas les habitants du quartier Bel-Air-Grands-Pêchers pour qui rien ne devrait malheureusement changer.Pire, il risque d’être à l’origine de la création d’un nouveau ghetto scolaire dans le Haut Montreuil.

Il est en effet prévu que ce nouvel établissement accueille tous les élèves actuellement en CM2 dans un nouveau secteur centré sur l’école Nanteuil et formé de quartiers jusque-là sectorisés sur les collèges Fabien, Jean Jaurès ou encore Lenain de Tillemont (quartier St-Antoine). Seront aussi concernés les collégiens habitants ce nouveau secteur et actuellement scolarisés dans d’autres établissements.

Ainsi, la majorité PS-EELV au Conseil général a actée la mise en place d’un recrutement uniquement centré sur le Haut Montreuil. Cette décision ne risque-t-elle cependant pas d’aboutir inévitablement à la création d’un nouveau ghetto scolaire dans cette zone de la ville en grande difficulté ?

Le projet porté par Dominique Voynet d’installation d’un éco-quartier dans ce secteur ni changera probablement rien. Personne n’est dupe, les contournements de la carte scolaire seront légions. On peut par ailleurs s’imaginer, le collège Fidélis se trouvant non loin, que le choix du privé sera privilégié par certaines familles. Ces stratégies d’évitement n’ont rien de nouveau, cependant ce type de sectorisation ne peut que les renforcer.

Un état des choses qui laisse un gout amer du coté du quartier Bel-Air-Grands-Pêchers

La construction d’un nouvel établissement n’est pas en soi une mauvaise nouvelle pour Montreuil, bien au contraire. De nombreux établissements de la ville sont aujourd’hui complètement saturés. Cependant, l’arrivé de ce nouveau collège aux portes du quartier Bel-Air-Grands-Pêchers est vécue comme une humiliation par ses habitants.

En effet, le taux de remplissage de Lenain de Tillemont étant à ce jour d’à peine plus de 50%, la construction d’un nouvel établissement non loin de celui-ci est un double aveu d’échec. Tout d’abord, il est la preuve du désintérêt que portent les pouvoirs publics pour ce collège. Plutôt que le rendre attractif avec de véritables mesures, on préfère fermer les yeux et attendre de voir de quoi l’avenir sera fait, sacrifiant ainsi une partie de la scolarité de centaines d’enfants.

Cette décision est par ailleurs le symbole de la faillite de la politique d’éducation prioritaire. Malgré toutes les appellations qui ont pu lui être données ZEP, REP, RAR et aujourd’hui ECLAIR, Lenain de Tillemont reste en grande difficulté. La stratégie d’évitement de cet établissement, aujourd’hui actée par le Conseil général lui-même, via la création d’un nouveau collège et la suppression d’une partie de son secteur de recrutement (quartier St-Antoine), en est aujourd’hui la preuve.

Du coté des familles du Bel-Air et des Grands-Pêchers le sentiment d’abandon est aujourd’hui très important. Voir un nouvel établissement tout neuf s’ouvrir aux portes du quartier est très mal vécu par ces parents qui envoient chaque jour leurs enfants dans ce bloc de béton datant des années 70 qu’est Lenain de Tillemont.

Malheureusement, avec la nouvelle sectorisation qui s’annonce, le risque de statu quo est grand. Les tripatouillages de dernière minute afin d’attribuer au collège quelques secteurs de la ville moins défavorisées, comme par exemple l’ensemble de la rue de Rosny, n’y changeront rien. Face à cet état des choses, certains parents d’élèves avouent en être aujourd’hui rendus à taper à la porte du privé, même si cela leur demande des sacrifices.

La construction de ce nouvel établissement n’a donc pas finir de faire parler d’elle. Tout d’abord, par ce qu’elle ne s’attaque qu’à une partie du problème, la saturation des effectifs sur la ville, laissant ainsi de côté la question essentielle de la ghettoïsation scolaire et les grandes difficultés rencontrées dans certains établissements comme Lenain de Tillemont. Ensuite, parce qu’elle fait entrer le privé dans le service public de l’éducation via le recours au partenariat public-privée (PPP). Les concertations à venir avec les parents d’élèves mais aussi les enseignants risquent donc d’être houleuses.

Matthieu Lépine

.